Le Naufrage moral et communicationnel d’Israël

L’image est époustouflante. Elle passe en boucle à Al Jazeera. Un soldat israélien, sergent-chef de son état, tombe sous les balles ennemies. Jusque-là, il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Mais, contre toute attente, on voit un combattant palestinien, avançant à pas assurés, s’approchant du cadavre avec un calme olympien, lui retirant munitions et fusil et s’en va vaquer à ses occupations guerrières comme si de rien n’était.

Sans crier gare, une autre image émerge de notre archive mémorielle, comme pour nous rappeler l’indicible : des soldats israéliens donnant des coups de pieds, crachant et même urinant sur des cadavres palestiniens. Le contraste est saisissant entre une résistance animée par une noble cause et une armée animée par une malveillance primitive.

Cette double scène indique qu’Israël donne libre cours à ses fantasmes, les plus morbides, ne contrôlant plus ni images, ni signes, ni symboles. Serions-nous surpris, si Israël ne projette qu’une image repoussante ?  Dans ce contexte, toute communication s’avère l’alpha et l’oméga.

une armée animée par une malveillance primitive.

Adieu Israël stupeur et tremblement

Qui nierait donc qu’il y a l’Israël d’avant la guerre à Gaza et l’Israël d’après ? L’Israël d’avant, c’était stupeur et tremblement. C’était la seule démocratie dans le désert arabe. C’était l’armée la plus morale du monde !

Certes, il y avait des voix qui dénonçaient ces mystifications. Mais, la meute médiatique inféodée au pouvoir sioniste actionnait ses assourdissants mégaphones pour rendre ces voix inaudibles.

Ainsi, le mythe demeurait intact. Ne fallait-il pas attendre le combattant palestinien qui retira à son ennemi son fusil, ses munitions et son discours ? Pour que tout soit chamboulé, pour que le maître des horloges perde le sens de l’initiative.

Le voilà donc dans toute sa nudité. Mais, cuirassé dans sa bulle. Il n’a aucune conscience des mutations en cours. Il continue sa guerre en toute quiétude, jusqu’au jour où on lui apprend de toute part, que sa guerre est un effroyable génocide. Israël est choqué, révolté, jure ses grands Dieu qu’il ne fait que se défendre ! 

On affame une population

Génocide, la boite de Pandore

Et le génocide réfuté se mue en boite de Pandore. Tout un non-dit occulté remonte à la surface et finit par rétablir les faits. Tout n’a pas commencé le 7 octobre. Non, le point de départ, c’est la Nakba en 1948. Non, le 7 octobre n’est qu’un repère dans un chemin ensanglanté, où l’exil, la spoliation, la déportation, tiennent le haut du pavé.

Qu’a-t-il Israël à opposer à ce discours qui émane des entrailles d’une souffrance ?    Une communication propagandiste israélienne qui redouble de férocité égocentrique : Bernard-Henri Lévy vient dire qu’Israël est l’État modèle, l’emblème anticolonial ! Finkielkraut voit que la faute revient à la dimension surnuméraire enfantine à Gaza ! Mayer Habib nous dit qu’un juif ne peut pas être un colon ! Ce qui sous-entend que le juif est un ange pétri de pureté céleste ! Alors que le palestinien n’est qu’un sous-homme !

Une communication vieillotte, ressassée jusqu’à la nausée, où le mythe se substitue à l’histoire, les certitudes dictées par une vérité absolue. Le réel comme le conjoncturel sont écrasés par une vulgate sioniste imbibée de sa doxa biblique. Autant cette vulgate est frappée d’obsolescence, autant elle signe et persiste à nous refourguer sa camelote.

La Bible, un vulgaire cadastre ?

L’image d’Israël est dans la boue. Il arrive qu’une image soit entachée, mais que l’on puisse redorer. Mais que peut-on redorer, quand on affame une population, quand on déchiquète des bébés, quand des soldats urinent sur les cadavres avant de les livrer aux chiens ? L’infâme est ainsi gravé au burin. Son empreinte est irrémédiablement ancrée dans les mémoires.

Toute légitimité s’effiloche. Un travail archéologique est entamé. Fantasmes, fictions et terre promise, s’effondrent pour ne laisser place qu’à une vérité écorchée vive.

Le coup de grâce vient incontestablement de ces juifs scandalisés, révoltés, contre un sionisme qui instrumentalise leur judéité, transformant leur livre sacré en un vulgaire cadastre. Ces femmes, ces hommes de conscience, fidèles à leur tradition juive de justice, tendent une main généreuse à leurs frères palestiniens. 

Les amants de Sion n’aiment pas cela. Ils se mobilisent pour sauver les meubles. Ils font appel à leur trouvaille la plus prodigieuse : un État palestinien. Véritable poudre aux yeux, visant à tuer définitivement le rêve démocratique d’un peuple.

Un État croupion et difforme

Un État croupion sans continuité territoriale ? Un État à la Mahmoud Abbas? Cautionnant colons, apartheid et fanatisme. Un État autocratique, à l’instar de tous ces États arabes, musulmans, israélien, qui n’arborent l’étendard de la démocratie, que pour mieux tordre le cou à la démocratie.

Non et non, le seul État qui sortirait palestiniens, israéliens et tout le Moyen-Orient de cette danse macabre, est l’État judéo-islamo-chrétien, qui bannirait tout messianisme sioniste, islamiste, évangéliste. Un État multiculturel où toutes les opinions, tous les livres sacrés, sont traités d’égal à égal. Toutes les religions s’expriment et s’affrontent dans une agora de diversité et d’honneur.

Vision naïve et utopique ? Mais les utopies d’hier ne sont-elles pas la réalité d’aujourd’hui. Depuis quand l’homme ne se nourrit que du pain froid, du pain rationnel ?  

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